Des parents peuvent-ils choisir pour leur enfant français un prénom comportant un tilde, comme « Fañch » ?

Le 27 mai 2002, puis le 19 janvier 2009, le Procureur de la République de Rennes et l’Officier d’Etat Civil de la ville de Paris ont répondu par l’affirmative: des parents peuvent choisir un prénom comportant un tilde. C’est aujourd’hui la cour d’appel de Rennes, dans un arrêt du 19 novembre 2018, qui se prononce en faveur du tilde.

La loi n°93-22 du 8 janvier 1993 relative à l’état civil, à la famille et au droit de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales consacre le principe de liberté de choix de prénom.

Aux termes de l’article 57 du Code civil, lorsque le prénom choisi par les père et mère lui paraît contraire à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à voir protéger leur nom de famille, l’officier de l’état civil en avise sans délai le procureur de la République. Celui-ci peut saisir le juge aux affaires familiales. Si le juge estime que le prénom n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant ou méconnaît le droit des tiers à voir protéger leur nom de famille, il en ordonne la suppression sur les registres de l’état civil.

Il y a alors lieu de s’interroger sur la possibilité pour un officier d’état civil d’admettre certains prénoms comportant des signes diacritiques non connus de la langue française.

A cet égard les principes suivants doivent être rappelés : les actes publics doivent être écrits en langue française sur le territoire de la République et l’emploi de la langue française est obligatoire, même dans les régions où l’usage de dresser les actes publics dans l’idiome local se serait maintenu. De surcroît, la langue de la République est le français.

Se fondant sur ces principes, il sera précisé que seul l’alphabet romain peut être utilisé et que les seuls signes diacritiques admis sont les points, tréma, accents et cédilles tels qu’ils sont souscrits ou suscrits aux voyelles et consonne autorisés par la langue française.

Si la convention n°14 de la Commission Internationale de l’État Civil relative à l’indication des nom et prénoms dans les registres de l’état civil reconnaît les signes diacritiques étrangers, il convient de relever que celle-ci n’a pas été ratifiée par la France.

Dès lors les voyelles et consonne accompagnées d’un signe diacritique connues de la langue française sont : à- â – ä- é – è – ê – ë – ï – î – ô -ö – ù – û – ü- ÿ-ç

Or, le tilde ne fait pas partie des diacritiques connus de la langue française, de sorte que lorsque les parents de l’enfant ont choisi le prénom « Fañch », le Ministère Public s’y est opposé.

Cependant, la cour d’appel de Rennes a retenu que l’usage du tilde n’est pas inconnu de la langue française puisque le « ñ » figure à plusieurs reprises dans le dictionnaire de l’Académie française, dans Le Petit Robert et dans le Larousse de la langue française, qui comprennent les mots : Doña, cañon, señor et señorita.

De même, des décrets de nomination du Président de la République concernant le Consul Général de France à Johannesburg en date du 20 avril 2017 ou les décrets de nomination du Président de la République concernant les sous-préfets de Bayonne en date du 15 avril 2010 et le préfet de police des Bouches du Rhône en date du 15 mai 2015 font mention de patronymes de personnes orthographiés avec un tilde sur le « n ».

En conséquence, c’est sans porter atteinte au principe de rédaction des actes publics en langue française ni à l’article 2 de la Constitution française que le prénom Fañch peut être orthographié avec un tilde sur le « n ».