RENFORCEMENT DU DISPOSITIF DE LUTTE CONTRE LES VIOLENCES CONJUGALES

Les violences conjugales ne doivent pas être considérées comme les autres violences, dès lors qu’il s’agit d’un phénomène de société d’une ampleur particulière d’une part, et parce qu’elles engendrent des conséquences spécifiques en termes physique, psychologique, économique et administratif d’autre part.

88 % des victimes de violences conjugales sont des femmes. 220.000 femmes ont été victimes de violences conjugales en 2019. 148 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint en 2019.

94.000 femmes ont été victimes de viol en 2018 : 10% d’entre elles ont porté plainte et seulement 1% des auteurs de viol ont été condamnés.

Face à ce constat effroyable, la loi du 28 décembre 2019 entend renforcer la protection des personnes victimes de violences au sein du couple.

Le Juge aux Affaires Familiales peut être saisi par la victime, assistée ou non d’un avocat, ou bien directement par le Procureur de la République qui aura eu connaissance de l’existence de violences conjugales commises par le mari, le partenaire de pacs, le concubin ou encore l’ex-conjoint.

Il n’est pas nécessaire qu’il y ait encore une cohabitation entre les conjoints pour pouvoir bénéficier de mesures de protection.

Le délai au terme duquel le Juge aux Affaires Familiales doit se prononcer sur la demande de protection a été raccourci dans l’intérêt bien compris des victimes. Désormais, le Juge doit rendre sa décision dans un délai maximum de 6 jours à compter de la date à laquelle l’audience aura été fixée.

Pour pouvoir bénéficier de mesures de protection, la victime doit rapporter la preuve de deux éléments :

  • Des violences vraisemblables : il n’est pas nécessaire de rapporter la preuve de violences avérées, mais seulement de la vraisemblance de l’existence de violences
  • Un danger, c’est-à-dire un risque actuel de réitération des violences.

Si ces deux conditions sont réunies, le Juge rendra une ordonnance de protection judiciaire et pourra :

  • Ordonner la résidence séparée du couple et fixer les modalités de prise en charge des dépenses du logement. Par principe, le conjoint violent doit quitter les lieux, y compris s’il s’agit d’un bien appartenant en propre audit conjoint, sauf si la victime ne souhaite pas se voir attribuer la jouissance du logement de la famille.
  • Faire interdiction au conjoint violent d’entrer en relation avec la victime par quelque moyen que ce soit.
  • Faire interdiction au conjoint violent de se rendre dans certains lieux précisément déterminés, dans lesquels la victime se trouve habituellement (ex : aux abords du lieu de travail, à la sortie de l’école).
  • Faire interdiction au conjoint violent de porter une arme.
  • Autoriser la victime à dissimuler sa nouvelle adresse.
  • Statuer sur la contribution aux charges du mariage si les conjoints sont mariés ou sur l’aide matérielle si les conjoints sont pacsés.
  • Statuer sur les modalités de l’exercice de l’autorité parentale, la résidence des enfants, la pension alimentaire.
  • Proposer au conjoint violent une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou bien un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple.

En revanche, le Juge ne peut ni ordonner une mesure d’expertise, ni prononcer une interdiction de sortie du territoire.

Les mesures de protection ordonnées par le Juge sont valables pendant 6 mois. Elles sont automatiquement prolongées lorsqu’une demande de divorce ou séparation de corps ou une demande de fixation du statut des enfants est introduite à la suite de l’ordonnance de protection judiciaire.

Une ordonnance de protection a pour effet de :

  • Permettre au conjoint victime de violences conjugales, en situation irrégulière sur le territoire national, de bénéficier d’une carte de séjour temporaire portant mention « vie privée et familiale », sans bien évidemment qu’une obligation de cohabitation avec le conjoint violent ne soit imposée à ladite victime.
  • Permettre à la victime de prétendre à une aide financière pour se reloger. Il s’agit là d’un dispositif expérimental pendant une durée de 3 ans.

Une innovation majeure de la loi du 28 décembre 2019 est la création d’un bracelet anti-rapprochement porté par le conjoint violent. Ce dispositif de géolocalisation permettra ainsi d’éviter que le conjoint violent ne s’approche de la victime. L’accord du conjoint violent devra être recueilli par le Juge. En cas de refus, le Procureur de la République sera immédiatement informé. Ce dispositif n’est pas encore mis en place à ce jour. Un décret en Conseil d’Etat devrait intervenir en ce sens au mois de septembre 2020.